(Terminé) Le Dojo [Raven]

 Deux semaines s'étaient écoulées depuis la dernière fois que Raven était passée au dispensaire. Le temps filait si vite que cela en devenait chaque jour un peu plus effrayant. Ma vie avait pris un autre ascendant depuis que j'avais rejoint la cause des Pacificateurs, j'avais rarement une journée de repos et je travaillais sans relâche. Comme tout homme ou tout Asarien, j'avais mes limites et je ne devais pas me laisser submerger par un burn-out total, après tout ce mode de vie je l'avais choisi, j'en étais donc responsable. Je pouvais très bien me résoudre à n'être qu'un modeste infirmier mais non il fallait toujours que j'en fasse plus et plus en encore, c'était dans ma nature et personne ne me changerait, et encore moins moi-même ! Pourtant forcer un peu plus chaque jour aurait de graves conséquences sur ma santé, la jeunesse et la mutation me donnait l'énergie suffisante mais pour combien de temps ? Bref, inutile de me laisser accaparer par mes pensées pour le moment, j'avais rendez-vous avec Raven dans moins d'un quart d'heure et je n'étais même pas prêt, ni même changé. Je hâtais donc le pas en franchissant les portes du dojo car il fallait avant tout que je passe par les vestiaires pour enfiler pour kimono. Une fois revêtu de la traditionnelle tenue et de ma ceinture, je commençai la séance par un petit moment d'échauffement, primordial pour ne pas causer de lésions musculaires imprévues. Après tout le karaté était un sport brutal pour un corps non entraîné, il fallait y aller progressivement et surtout ne pas mettre tous mouvements à portée de tout le monde, c'était la raison pour laquelle j'avais longuement préparé cette séance avec Raven dans un coin de ma tête pour ne pas la rendre trop brusque.

A ce propos, Raven et moi étions si différents l'un de l'autre, que ce soit en terme de race : elle était humaine et moi Asarien, comme dans le caractère où nous étions opposés sur pas mal de points mais qu'importait nous étions amis et je n'aurais jamais laissé personne en douter. Peu importait les petites brimades que nous nous envoyons parfois, cela n'avait rien de personnel et surtout rien de méchant. La preuve, je ne lui aurais pas proposé une séance particulière de karaté avec moi si nous étions sur des ondes complètement différentes. J'avais juste envie de lui apporter mon aide parce que c'était dans mon tempérament que de vouloir protéger, mais avait-elle réellement besoin de moi. Pas vraiment j'en étais sûr mais j'en étais persuadé, cet entrainement n'était pas anodin, j'allais quand même l'aider bon d'une certaine manière il était vrai...Trêve de trop penser... Mais c'était plus fort que moi.

La jeune femme n'étant toujours pas arrivée, je jetai mon dévolu sur un autre élève du groupe, très prometteur visiblement, aussi bien dans ses motivations que dans ses techniques de combat. Ce genre de profil je l'appréciais particulièrement, encore un petit gars qui en voulait, de toute manière le karaté c'était comme la vie, on avait rien sans rien, soit on y mettait son cœur et ses tripes, soit on avait plus qu'à remballer son kimono et aller voir ailleurs. Bon d'accord j'étais un peu dur mais tellement réaliste dans le fond. Cela en faisait pas non plus un sport d'élite bien sûr ni un sport réservé aux forts physiquement ça par contre à mes yeux c'était un raisonnement complètement absurde mais plutôt à des êtres capables de tout donner dans un seul et unique but : se surpasser, aller aussi loin que ses propres limites le permettaient, voilà bien pourquoi j'avais choisi ce sport, le seul capable de libérer ce trop plein d'énergie qui coulait sans cesse sous mes veines. Après dix bonnes minutes d'entraînement avec l'élève en question, je lui accordai un bref temps de repos, le temps de me désaltérer abondamment mais aussi de vérifier si Raven n'était pas arrivée entre temps, après tout il y avait de quoi se perdre dans les nombreux couloirs de ce dojo. Je préférais donc l'attendre à l'extérieur du coup, assis sur les marches qui menait directement à la structure d'entrainement, prenant un bon bol d'air frais au passage. La température extérieure était si froide qu'elle traversait mon frêle kimono blanc et j'avais la désagréable sensation que quelqu'un s'amusait à me planter des aiguilles partout dans le corps. Il m'en fallait plus pour me pousser à rentrer à l'intérieur... Mon regard perçant tentant de distinguer Raven parmi la foule abondante et la circulation bruyante et omniprésente de l'axe principal. La connaissant, elle était plutôt du genre à surgir dans mon dos... Mais au moins cela m'occupait l'esprit que de tout observer. Je jetai un regard discret à ma montre, me mettant à douter du jour et de l'heure tout à coup... Bref elle n'allait sûrement pas tarder, je me faisais juste quelques faux semblants, elle n'était pas du genre à revenir deux fois sur une décision, il fallait simplement que je prenne mon mal en patience...

Deux semaines s'étaient écoulées depuis la dernière fois où je m’étais retrouvée au dispensaire, à me faire soigner et discuter avec Sébastian, le médecin bénévole. Tout n’avait pas été très facile parce que je suis avant tout méfiante. J’appartiens au clan des Insoumis et il est toujours très délicat de faire confiance aux autres, ceux qui ne vivent pas dans les souterrains, ceux qui ne connaissent pas notre mode de fonctionnement ni notre quotidien. Mais à force de discuter avec lui, j’avais pu apprendre à l’apprécier tout comme je l’avais mis en garde cette fameuse nuit au dispensaire de ne pas écrire mon nom sur ses paperasses administratives. Il n’avait pas compris sur le moment. Pourtant, Sébastian avait deviné que c’était pour moi une question très importante. Il avait laissé tomber. Nous avions pu alors discuter un peu et il m’avait offert son aide : celle de m’entrainer un peu, au moins savoir me défendre moi qui n’était habile qu’avec des ordinateurs, des câbles, des processeurs et des logiciels.

Le rendez-vous était donné au Dojo qui se situait dans le dôme des Vices et Plaisirs. Vu de cette façon-là, j’aurai dû prendre mes jambes à mon cou et rebrousser chemin. Sauf que têtue et bornée comme j’étais, j’allais toujours au bout des objectifs que je me fixais. C’était loin du territoire des bidonvilles que je connaissais par cœur. Le reste de la cité était un terrain inconnu pour moi et inutile car je ne venais jamais par ici. Cela ne m’intéressait pas de rencontrer des Asariens friqués et dangereux. Les quartiers miséreux avaient déjà leurs lots de  difficultés et de pièges. Personne ne savait que j’allais sous un autre dôme. Aucun Insoumis car j’aurai eu droit à une réprimande de Logan, voir même une interdiction de m’y rendre. On ne me nommait pas « la souris des abysses » pour rien, je m’étais donc  faufilée dans les tunnels en direction du cœur de la cité de verre. J’avais pu mémoriser assez facilement les plans des galeries qui me mèneraient tout droit au bon endroit. Et sans éveiller les soupçons, je m’étais alors retrouvée juste au-dessous d’une trappe d’égout qui donnait dans une ruelle du dôme, à quelques pas du dojo où m’attendait Sébastian. En regardant ma montre, je pouvais déjà y lire mon retard. C’était fait exprès de ma part.  Il était encore trop tôt pour que je sorte de la galerie. Imaginez qu’on aperçoive une silhouette sortant des égouts ? J’aurai la Milice sur le dos. Je devais faire très attention.

Je n’étais plus à vingt minutes près et j’espérai que Sébastian ne soit pas fâcher de mon retard ni ne soit rentré chez lui à force de m’attendre. Je grimpai les marches rouillées de la vieille échelle, et tout en haut j’actionnai le mécanisme pour faire glisser la trappe sur le côté et me glisser à l’extérieur. Les plans que nous possédions étaient justes. Je me retrouvai dans une petite ruelle piétonnière, qui correspondait à l’arrière d’une brasserie. Donc pas beaucoup d’allées et venues de ce côté-là. Ça m’arrangeait. Je refermai la trappe et je longeais les murs pour observer la rue qui s’offrait  à moi. Je devais me comporter d’une façon normale où j’aurai tous les yeux braqués sur moi à force de jouer les ombres. Je remontai la fermeture-éclaire de mon blouson, je relevai mes cheveux de façon à en faire une queue de cheval et je commençai à suivre mon chemin, tout en ne fixant personnes. Le bâtiment qui abritait le Dojo était en face de moi, mais je devais le contourner car son entrée se situait de l’autre côté de ma position.

Je traversai et je continuai mon chemin en suivant bien les courbes de l’établissement jusqu’à enfin me retrouver à quelques mètres de l’entrée. Je reconnus tout de suite Sébastian, assis sur les marches. Un fou rire s’éveilla dans ma gorge au point de devoir mettre ma main sur la bouche.

- Tu ne crois tout de même pas que je vais porter cet accoutrement pour quelques heures de cours ?!

Je me montrai finalement, me postant devant Sébastian, riant aux éclats.

- ça peut avoir son charme, certes, et son utilité, mais je vais quand même rester avec mon jean pour ce soir. Tu ne m’en voudras pas si je ne vêtis pas le kimono de rigueur ?

J’enfonçai mes mains dans les poches de mon blouson, me recroquevillant  pour me réchauffer de l’air frais engendré par les gros générateurs de climat qui se situaient sous chaque dôme en verre.

- On rentre ? Il commence à faire de plus en plus froid. Tu vas bien depuis la dernière fois ? Tu as l’air fatigué ? Quelque chose ne va pas ?

Cela faisait presque une demi-heure que je patientais à l'extérieur, heureusement que je ne lui facturerai rien car les heures de cours de karaté, ce n'était pas vraiment donné alors si le cours durait moitié moins de temps pour le même prix, ce n'était pas notre problème, du moins celui du maître du dojo. Par chance avec Raven c'était quelque peu différent, je lui donnais juste un petit coup de main pour lui apprendre à se défendre, à se sortir de mauvaises passes par quelques petites techniques de combat souvent utilisées, je n'allais pas non plus lui apprendre des katas ultra compliqués, ça pouvait se comprendre, surtout que là on en avait pas pour des heures mais plutôt pour des années à apprendre ce genre de choses. Je n'avais que très peu de temps devant moi, il fallait que je sois bref mais surtout concis dans ce que j'allais lui enseigner. Ce fut son rire qui me sortit de ma torpeur, enfin surtout de ma méditation dans pareil instant. S'il y avait bien un endroit dans lequel j'étais aussi concentré que face à un patient souffrant, c'était bien au dojo. C'était dans mes traits de caractère après tout, j'étais un homme posé et sérieux, du moins dans ce domaine là. Bien sûr, il m'arrivait de faire des écarts de conduite mais ça c'était plutôt au cours d'une soirée bien alcoolisée ou devant une demoiselle un peu trop entreprenante. Et oui même un karatéka confirmer perdait le contrôle parfois, je suis un individu de sexe masculin après tout non ? Et je le revendique bien haut et fort d'ailleurs...

"- Bonjour Raven et bien et bien, tu te permets non seulement d'être en retard à mes cours et en plus de te moquer de la tenue traditionnelle ? Tu n'as vraiment pas froid aux yeux mais qu'est-ce que je vais donc faire de toi ?"Ajoutai-je en riant, me demandant tout de même si je pouvais me permettre d'aller l'entraîner à l'encontre de nos principes ancestraux... J'en avais absolument rien à faire mais si mon maître me croisait, je passerai un sale quart d'heure d'une part parce que j'entraînais une jeune femme gratuitement et à ma convenance et vêtue en civil de surcroit.

"- Viens, dépêche-toi de rentrer. J'en ai rien à faire du kimono sur toi ou non par contre mon maître serait furieux, allons dans l'arrière-salle on sera sûr d'avoir la paix."

Ce fut donc discrètement que je la conduisais dans une autre salle de l'établissement, moins bien équipée que la principale, certes, mais suffisante pour lui enseigner le programme que j'avais prévu. Une fois à l'intérieur, je ne pus retenir un léger frisson tant la température était restée basse pour la saison. Enfin faut dire ce qui était, je n'étais guère habitué à pénétrer dans cette salle pour y former clandestinement une jeune femme mais l'un comme l'autre, on avait choisi la discrétion alors il fallait faire avec tous les inconvénients que cela pouvait engendrer.

"- Ne t'inquiète pas pour moi, je vais bien. C'est juste que je bosse trop."

Je n'allais pas non plus m'apitoyer sur mon sort, j'avais choisi cette vie de folie après tout et c'était hors de question que Raven sache la vérité à mon sujet, elle n'avait rien à voir là-dedans, elle ne savait même pas qui j'étais en dehors du dispensaire et c'était tant mieux. Je mettais assez ma vie en danger, alors pas la peine de rajouter celle des autres.

"- Désolé pour ces étranges conditions d'entraînement mais autant rester discrets, je pense que tu seras d'accord avec moi sur ce coup là. De toute manière la pièce principale est déjà occupée et je doute que tu aies envie de te mêler à tous ces mecs en kimono bien aguerris à la recherche d'une âme innocente. Enfin si tu préfères t'entraîner avec eux, rien ne t'en empêche t'as juste à me le dire."

Je me demandais néanmoins par où on allait pouvoir commencer mise à part un banal échauffement, le mieux étant de lui demander ce qu'elle attendait de moi au juste histoire de parfaire nos petites séances improvisées. Quel que soit l'endroit d'où elle venait, je me doutais bien qu'elle ne viendrait sûrement pas trois soirs par semaine comme moi. Quoi que avec ma vie de Pacificateur, cela m'était devenu difficile de fréquenter le dojo en ce moment. Il m'avait fallu faire des choix et hélas cela empiétait dangereusement sur ma passion des arts martiaux. Hélas, je l'avais appris à mes dépens, dans ce monde on avait vraiment rien sans rien.

"- Raven, on va d'abord faire un petit point sur ce que tu attends de moi exactement. Que veux-tu apprendre ? Les bases ? Un peu plus poussées peut-être ? Juste à te défendre ? A faire mordre la poussière à ex trop prétentieux ou trop entreprenant ? Bref les possibilités sont larges, tout dépendra aussi de la fréquence de tes venues à nos petits courts particuliers si tu vois ce que je veux dire... Enfin d'abord, on va commencer par un petit échauffement, tu me fais 5 tours de salle et au trot s'il te plait. Je vais t'accompagner ça fait meilleur genre, tu vois je ne suis pas qu'un gros fainéant qui regarde."

Après tout, j'avais besoin d'un bon échauffement moi aussi même si faisait déjà plus d'une heure que j'étais sur place. Entre temps les muscles de mon corps s'étaient refroidis et je savais à quel point le karaté pouvait être un sport autant exigeant pour les nerfs que pour les muscles. Ce fut donc d'un rythme soutenu que je l'incitais à faire un petit footing d'entrainement autour de la pièce, j'étais sportif oui mais j'espérais bien qu'elle me suive, je savais qu'elle en était parfaitement capable, j'avais de bons yeux pour deviner cela, au pire je diminuerai la cadence mais pas pour le moment...

Je n’avais pas pu m’empêcher de rire devant  la tenue que portait Sébastian. Ce n’était pas un manque de respect de ma part, mais je ne m’attendais pas à ce que cet entrainement soit des plus officiels. Alors, le découvrir habillé ainsi m’avait fait un drôle d’effet.  Je le taquinai et bien sûr le jeune homme ne manqua pas de répondre.

- Tu sais … moi et les règlements, ça fait deux.  Ce que tu peux faire de moi ? Bof pas grand-chose, mis à part avoir mal à la tête à la fin de la soirée. Je suis un vrai moulin à parole quand je m’y mets. T’as l’air vachement sexy comme ça !

Son rire accentua le mien. Qu’il était bon de rire parfois malgré la noirceur de ce monde où nous vivions. Je n’avais pas précisé à Sébastian que je savais tout de même respecter les règlements, un seul pour tout dire, celui des Insoumis, mais ça c’était vraiment différent. La communauté du monde souterrain était régie par des codes qu’il fallait respecter si on voulait avoir une place dans les abysses et si on voulait vivre. Il n’y avait pas vraiment beaucoup d’hésitation quand on vous offrait sur un plateau, une deuxième chance ainsi que d’échapper à la Milice. Le froid se faisait de plus en plus menaçant et j’acceptai avec joie de suivre mon professeur à l’intérieur du dojo. Il m’expliqua que le kimono était de rigueur et que si son maître nous prenait sur le fait, il risquerait de passer un sale quart d’heure.

- T’aurais peut-être dû choisir un autre endroit que le dojo si tu risques à tout moment de tomber sur ton maitre. Tu entraines une nana qui ne porte pas de kimono, inconnue dans la liste des élèves inscrits. T’aimes bien le risque toi ou je me trompe ?

Je le suivis dans les différents couloirs du dojo. Il nous amena dans une salle où il n’y avait personne. Lorsqu’il alluma la lumière et que j’entrai à mon tour, je compris rapidement que cette salle ne servait pas beaucoup ou alors très peu, mais qu’aujourd’hui elle avait dû rester fermée. Le chauffage avait été baissé et je ressentais la fraicheur me caresser le visage. Il répondit enfin à ma question sur les traits fatigués que présentait son visage.

- C’est bien d’être à fond dans son boulot. C’est aussi bien parfois de se laisser du temps pour soi. Tu vas finir par t’user et t’épuiser. Tu devrais faire attention à toi.

Jetant un œil circulaire à la salle, je trouvai vite le chauffage, du moins la commande. C’était un boitier mural qui affichait 8° dans la pièce. Avec mon index, je tapotai la petite touche et la température augmenta jusqu’à atteindre les 18°. C’était ni trop chaud ni trop froid pour pouvoir apprendre quelques notions de base. J’ôtai mon blouson et mes bottines. J’attendrai que la salle se réchauffe un peu plus pour retirer mon pull. J’aimais être à l’aise surtout quand il fallait faire des mouvements bien précis.

- Non ça me va très bien, t’inquiètes pas pour ça ! Et je n’ai pas très envie d’aller me frotter avec d’autres mecs en kimono. Tout comme je n’ai pas très envie  qu’on sache que je suis là. La discrétion me va très bien ! Je garde un peu mon pull parce qu’il fait encore un peu frais dans la salle. Je me demande comment tu fais pour ne pas avoir froid avec ce seul tissu que tu portes sur toi.

J’étais reconnaissante à Sébastian de faire tout cela pour moi. Il était épuisé par son boulot, mais prenait du temps pour m’apprendre des notions de défense et d’attaque. Cela pouvait lui couter cher si j’avais bien compris et si son maitre nous voyait ainsi tous les deux. A votre avis pourquoi je refusais le kimono ? Parce qu’il me serait bien plus facile de fuir et de disparaitre habillée ainsi s’il y avait une menace dans le coin qu’avec un kimono sur le dos. J’étais une Insoumise. On nous apprend à survivre et à échapper à tous les dangers qui peuvent nous entourer.

Je mis les pieds sur le tatami, en chaussettes tout en écoutant les questions que Sébastian me posait. Mais pas le temps de trop réfléchir à cela que déjà il fallait courir au petit trot … comme si je ne courrai pas assez dans ma petite vie d’Insoumise ! Bah voyons ! Hop, j’enchaînai donc les petites foulées avec mon professeur qui s’était joint à moi.

- J’ai pas d’ex trop prétentieux ou trop entreprenant qui vient m’emmerder. Par contre, savoir me défendre et attaquer, ça oui ! Avec ma petite taille, le mec face à moi a toujours cette manie de me ceinturer sauf qu’à part me débattre et à m’épuiser toute seule, je ne fais pas grand-chose. Attends ! Je vais te montrer.

J’arrêtai de courir et on se positionna tous les deux au centre du tatami. Je me positionnai de telle sorte d’être dos à lui, prenant son bras pour le placer autour de ma taille.

- Voilà une des situations complexes. Qu’est-ce que je peux faire avec un mec dans le dos qui m’emprisonne ?  Je sais donner des coups, mais il ne lâche jamais. J’ai beau forcé sur le bras qui m’entoure, ça ne marche pas non plus … J’ai l’impression de n’avoir aucune marge d’action quand je suis comme ça.

Raven était du genre à avoir le dernier mot, c'était évident, cela m'amusait plus qu'autre chose. Je n'étais pas connu pour être vraiment chiant du moins d'un point de vue purement masculin mais sûr qu'ici au dojo, je n'allais sûrement pas la laisser me dominer au sens verbal bien sûr ! Un plan drague ? Sûrement pas, du moins pas ici, probablement le seul endroit au monde où je parvenais à rester sérieux plus de deux heures d'affilé, durée de mon entraînement en général. Mais bon comme je le disais bien souvent, un écart n'était jamais impossible. Elle faisait bien de faire la maligne dès maintenant car sûr que je n'allais pas la ménager, j'étais là pour l'apprendre à se battre après tout, ça ne s'apprenait pas si facilement que ça, d'un claquement de doigt. Même après dix ans de karaté, j'en apprenais encore chaque jour, la preuve qu'on n'attendait jamais la perfection pourtant tellement désirée.

"- En vérité je n'ai quasiment jamais froid, ça doit être hormonal ou un truc du genre. Toi en revanche tu vas vite avoir chaud et ton pull je te garantie que tu vas l'enlever plus tôt que prévu." Rajoutai-je avec toujours ce petit sourire en coin. On allait vite voir si j'avais raison ou non mais elle n'allait que trop se dépenser et dissiper cette énergie qui s'exprimait en elle avec tant de hargne. Elle avait du potentiel  c'était certain alors autant l'exploiter. J'haussai un sourcil quelque peu intrigué quand elle se colla presque à moi pour me montrer la dite prise, sérieux il y avait encore des goujats de cette trempe dans les rues ? Franchement le genre humain enfin ou Asarien aussi, je ne le comprendrais jamais. S'en prendre à une fille d'une manière aussi lâche, c'était juste inadmissible, impardonnable. Je fis semblant de réfléchir l'espace d'un bref instant.

J’aimais bien Sébastian. C’était un mec qui pouvait se montrer très professionnel (je me souvenais de notre dernière conversation au dispensaire et comment il m’avait soignée et pris le temps de m’écouter sans jamais rien m’imposer) tout comme il pouvait se lâcher et rire avec moi comme maintenant. J’avais horreur des personnes trop  sérieuses, ça finissait par me taper sur les nerfs à un moment donné. Le kimono lui allait comme un gant. On aurait dit un champion de judo ou de karaté. Il avait une belle allure et ça ne m’étonnait pas qu’il soit entouré de belles femmes à part ici, ce soir dans la salle d’entrainement. Je secouai la tête affichant une moue espiègle.


- Nan, je n’irai pas dire que c’est mon fantasme, mais bon, je peux comprendre certaines femmes.

Je ne lui avouerai pas mon fantasme. Ce n’était pas vraiment le moment pour ça et d’ailleurs c’était personnel. Moi qui ne me confiais guère, peut-être seulement à Alexandra, alors de là à tout raconter à un type même si je l’appréciais, pas vraiment. Il m’expliqua aussi que  nous devions faire à très attention que son Maitre ne nous trouve pas ici. Il avait pris de gros risques à me donner rendez-vous dans le dojo. Je n’étais pas une élève, donc je n’avais pas accès à ces salles. Ma présence pourrait lui apporter quelques tracas, mais Sébastian aimait les défis de ce genre. C’était un casse-cou comme il s’employait à me le dire. Pourtant, j’avais une impression bizarre lorsqu’il commença à me raconter qu’il préférait l’action, qu’il n’était pas du genre à rester passif dans son coin. Qui était-il véritablement ? Quel était ce combat qui le poussait en avant ?  J’étais curieuse cependant je savais aussi que nous portions tous en nous un jardin secret. J’étais une Insoumise, je vivais six pieds sous terre, dans les anciennes galeries de la cité, mais cela personne ne le savait encore moins lui.

La salle était froide et je n’avais pas l’intention d’attendre qu’elle se réchauffe. J’avais augmenté la température et je m’étais délestée de mon blouson et de mes chaussures pour le rejoindre sur le tatami.


- Tu dois avoir le sang chaud pour supporter autant de fraicheur ! Ha, mais je ne dis pas le contraire concernant mon pull ! Je l’enlèverai dès que je serai bien réchauffée. Je suis là pour des exercices physiques donc à un moment donné le pull sera de trop. Mais pour l’instant, je le garde. Je suis frileuse, moi !

Le premier échauffement fut de courir et faire le tour de la grande salle. Bon je comprenais qu’il fallait y aller en douceur, mais je n’étais pas là pour m’endormir sur mes lauriers et c’est tout en faisant les petites foulées auprès de Sébastian, que les questions affluèrent et surtout une qui concernait une situation que je vivais très souvent. Avec mon petit gabarit, les hommes arrivaient à me ceinturer très souvent et je me retrouvais totalement prisonnière sans pouvoir m’échapper. Je mis fin à la petite course pour expliquer à Sébastian ce qui me préoccupait. Je lui montrai les gestes, collant mon dos à son torse et son bras autour de ma taille. La pression de son bras se fit alors plus intense. Il jouait le jeu et c’était ce que je voulais. Je sentis alors son souffle dans le creux de mon oreille me chuchotant quelques mots, l’écoutant attentivement.


- Euh … comment veux-tu que je te donne des coups dans le tibia ou dans ta belle gueule ? Je suis dos à toi, je ne vois rien !

Puis avant qu’il ne me réponde, je lui décrochai un coup de coude dans l’estomac. Il ne l’avait pas vu arriver celui-là, il se plia presque en deux, abandonnant la prise de son bras autour de ma taille. Je pus alors me retourner pour lui faire face et lui envoyer mon poing dans sa mâchoire. Pas trop faire quand même si je n’avais pas une force nécessaire pour le mettre KO, je ne voulais pas non plus lui faire mal.


- Ouais !! Ça marche bien ton truc  finalement ! J’aurai même pu te marcher sur le pied et tu aurais lâché prise !

Sébastian avait d’autres tours dans son sac apparemment  et il revint à la charge, me ceinturant de nouveau. Nous étions collés l’un contre l’autre et cette fois-ci nous nous faisions face. J’avais mis mes mains à plats contre son torse tandis qu’il me serrait pour me maintenir dans cette position.


- T’es le grand méchant …loup ? Ajoutai-je avec un grand sourire, plongeant mes prunelles bleutées dans son regard perçant. Qu’est-ce que je fais ? T’es sûr que tu veux savoir ? Mmmmm… Bah si je te tape que tu deviens ronchon, tant pis hein ! A tes risques et périls, M’sieur !

Je décidai d’écraser son pied, au niveau des orteils. Les pieds nus cela faisait aussi mal qu’avec des chaussures. Je mimai le coup dans ses attributs masculins, frôlant avec mon genou ses parties sensibles. Il me libéra puisque s’il avait vraiment reçu ce coup-là, il n’aurait pas pu faire autrement. Je le cognai à la mâchoire (round deux) et je le poussai violemment pour qu’il tombe sur le tatami. Avant qu’il ne puisse comprendre ce qu’il se passait, je m’installai à califourchon sur son torse, croisant mes bras devant moi.

- Bon, je pense avoir compris … Je suis une bonne élève, nan ? J’aurai droit à une bonne note ? M’esclaffai-je en disant cela. Je t’ai pas fait mal avec mon petit poing dans ta jolie mâchoire ? Je ne voudrais pas t’amocher et qu’après ta petite amie se pose trop de questions. Et maintenant, la leçon deux, c’est quoi ?

Je commençais à avoir chaud. Sébastian n’avait pas tort. Après quelques exercices, je sentais la chaleur mordre ma peau. Je retirai mon pull que j’envoyai hors du tatami, restant en débardeur, toujours assise sur mon mentor du moment.

Assise à califourchon sur Sébastian, j’avais réussi à le déstabiliser et à le faire chuter sur le tatami. J’avais quand même un avantage sur l’humaine lambda. Mes courses poursuites dans les bidonvilles et dans les galeries souterraines, pour échapper aux Miliciens, m’avaient donné une bonne endurance physique et elles m’avaient permise de muscler mon corps que l’on pouvait penser frêle à cause de ma petite taille. D’ailleurs Sébastian paraissait être très surpris de ma rapidité dans mes gestes et dans ma façon de réagir. L’expérience du quotidien nous forge pour survivre face à n’importe quel danger. Je commençais à avoir chaud et j’avais retiré mon pull que j’avais lancé plus loin pour ne rester quand petit débardeur.

- Toute attaque est bonne pour faire chuter l’adversaire : lutte gréco- je ne sais pas quoi ou combat au corps à corps. Tu penses vraiment que celui qui sera en face de moi, va me demander de choisir ma façon de me battre ?

Cet entrainement, si au départ était une excellent idée et je n’avais d’ailleurs pas hésité un moment à le rejoindre, commençait à devenir étrange. Il y avait quelque chose qui clochait. Au début j’avais pensé que c’était cet endroit, ce dojo et je ne m’étais pas plus penchée sur la question. Par contre, maintenant quelque chose titillait mon esprit, mais étrangement, je ne savais pas quoi, comme si mes interrogations refusaient de prendre forme. J’arquai un sourcil quand il commença à bouger sous moi, me soulevant de la force de ses jambes. Je me retrouvais assise non plus sur lui mais bien sur le tatami.

- Dans la rue, je ne pense pas que je me mettrai dans une telle position à califourchon sur mon adversaire fis-je en plissant mon nez, une moue de dégout rien qu’en imaginant faisant cela sur un soldat. Non, non, je ne suis pas fatiguée, mais j’ai quelques chose à te demander qui me trotte dans la tête.

Voilà ! On y était ! Le voile s’était enfin retiré de mes pensées et mes questions me revenaient. Je ramenai mes jambes contre ma poitrine, restant assise sur le tatami. Je l’observai avec un peu plus d’attention comme si je venais de m’éveiller d’un long sommeil.

- Comment ça se fait qu’un humain est accès à tout ça … tout ce luxe ? Ce dojo, ces entrainements, cet accès ? Rien n’est permis aux humains dans ce genre d’endroits. Aucun Asarien n’accepte des humains dans sa boutique et son établissement sauf si cet humain est un esclave et qu’il accompagne son maitre ou sa maitresse. Alors comment ça se fait que toi tu es là, m’expliquant que ça fait de nombreuses années que tu t’entraines ici ?

Je me redressai finalement sur mes jambes, croisant mes bras contre moi. J’étais bien incapable de sonder son regard, il était neutre et je ne distinguais rien de plus, pas de doute ou d’incertitude. Quoi qu’il en soit, je savais que je touchée du bout des doigts la vérité.

- Tu es qui Sébastian ? Ne me raconte pas des histoires. T’es pas un humain. T’es médecin au dispensaire, d’accord ! Des humains ont suivi, sous les directives du gouvernement, une formation de base pour pouvoir acquérir les gestes d’urgence, pour soigner la population des bidonvilles. Jusque-là, je n’avais jamais eu de doutes à ton sujet. Mais ce soir … C’est différent. Tu vis dans le confort, dans la tranquillité de ton quotidien. Tout ce qui nous entoure là est familier pour toi. Ce n’est pas les réactions d’un humain.

Je levai ma main vers lui comme pour le stopper de me répondre. Je n’avais pas terminé. Je voulais aussi qu’il comprenne autre chose, qu’il se rende-compte de ce qui était très important pour moi.

- Tu acceptes d’aider une humaine, ce qui fait de toi quelqu’un de différent. Je n’ai pas peur de toi parce que j’ai un passif qui me permet de dire que tous les Asariens ne se ressemblent pas, qu’ils ne veulent pas tous voir les Humains devenir leurs esclaves, les soumettre à leur volonté. Ce que je ne comprends pas c’est pourquoi tu cours autant de risques ? Quelqu’un pourrait entrer, là, maintenant. Un Asarien qui se demanderait ce que tu fais avec moi. Je n’ai pas l’allure, ni la tenue d’une femme de ton monde. Je n’aurai peut-être pas dû venir …

Je me détournai de Sébastian pour aller  ramasser  mon pull qui était retombé un peu plus loin et je  l’enfilai, rassemblant mes cheveux pour les discipliner.

- Tu me fais courir autant de risques qu’à toi. Le vois-tu ? J’aurai dû être plus vigilante quand tu m’as donné rendez-vous dans ce beau quartier. Une personne de mon entourage me dirait très certainement, que je suis inconsciente et aveugle. Il aurait raison. Je n’ai pas envie de finir mes jours au fond d’une cellule. C’est trop dangereux pour nous d’être ici.

Je croisais mes bras contre ma poitrine et j’écoutais les premières explications de Sébastian.  Au début, il avait pensé qu’un me mentant sur sa nature ça passerait mieux sauf que j’étais restée impassible. Il avait face à lui une petite humaine qui passait son temps à embobiner les Miliciens pour pouvoir sortir du pétrin quand elle s’y mettait. Vous connaissez le dicton : « Ce n'est pas à un vieux singe qu'on apprend à faire des grimaces ». C’était exactement cela pour moi. Mon silence et ma moue dubitative eurent raison de lui et il dut changer sa façon d’aborder les choses voyant que la première mouture de sa version n’avait eu aucun impact sur moi.  Avait-il bien saisi tout ce que je venais de lui dire un peu avant ?  Que je n’étais pas du genre à mettre tous les Asariens dans le même sac, car j’avais un passif qui me permettait de pendre ce recul. Que je n’avais pas peur de lui, mais apparemment il s’était lancé dans une sorte de plaidoyer pour défendre sa petite personne sans avoir écouté le moindre de mes mots.

- ça te fais ni chaud ni froid ? A moi aussi ! Tu crois être le premier Asarien que je croise et avec lequel je parle ?

Je le croyais quand il me disait qu’il n’avait eu aucune intention de me mettre en danger. Parce que dans un sens, il aurait pu nous y mettre tous les deux dans le pétrin. Et quand j’observais sa réaction, j’avais le sentiment que cela le dérangeait plus que cela l’ennuyait de me répondre, d’être obligé de se défendre, de se mettre à nu.

- Je te crois, mais j’aurai bien aimé que tu joues cartes sur table avec moi. Etre un Asarien aux yeux d’une humaine, OK, ce n’est pas vraiment le secret qu’on aime dévoiler. Pourtant, à un moment donné, je me serai bien posée des questions en voyant la facilité avec laquelle tu avais accès à ce genre d’endroits qui ne sont pas fréquentés par les humains. T’aimes pas qu’on te juge par ton acte de naissance et je ne suis pas du genre à le faire.

Me sentir en sécurité à ses côtés ? Je ne faisais pas confiance en beaucoup de personnes au sein même des Insoumis alors mettre ma vie entre les mains d’un homme qui paraissait honnête dans ses actes mais que je connaissais peu et que je croisais lors de mes virées au dispensaire, c’était beaucoup pour moi. Je ne pouvais pas en un claquement de doigts changer ma personnalité, façonnée depuis quatre ans à survivre dans les entrailles de la cité.

- Je me fous de tes gênes ! Et Non, tu ne portes pas la peste, mais tu me demandes de te faire aveuglément confiance alors que tu n’es pas toi-même sincère avec moi. Tu ne veux rien dévoiler sur toi mais en contrepartie, je dois me fier à tout ce que tu dis.  Tout ceci demande un effort et un investissement de part et d’autre. C’est donnant- donnant.  Pas juste moi. Je ne te connais pas tout comme tu ne sais rien sur moi sauf ce que je veux bien te montrer. Pourquoi a-t-on avis j’ai refusé de te donner mon nom au dispensaire, pour ce fichu formulaire que tu devais remplir ? Il est hors de question que je laisse une trace de mes passages. Je n’ai aucune intention d’être une proie pour les soldats. Mon prénom suffit déjà beaucoup !

Je le suivis des yeux lorsqu’il récupéra son pull qu’il noua autour de sa taille tout en réfléchissant à ce qu’il venait de me dire au sujet de son plan bateau si quelqu’un nous découvrait ici. Bien sûr que cela marcherait. On ne questionne pas un Maitre sur ses activités avec son esclave. Les Etres Supérieurs ont tous les droits sur les petits Humains.

- Sérieux ? Tu attendais qu’on soit dans la merde pour me sortir ce plan ? Une fois qu’on aurait vu débarquer je ne sais qui ! Super l’ambiance ! Je suis une bonne comédienne, mais j’aime autant être prévenue un peu avant ! Tu vois parfois dire la vérité c’est plus facile et cela génère moins de complications inutiles.

Je soupirai de lassitude et d’incompréhension. Il ne comprenait pas que sa manière d’agir était presque égoïste. Je ne le jugeais pas. D’ailleurs, je ne l’avais pas jugé sur ce qu’il était. Peut-être qu’à trop se cacher, qu’à trop jouer un jeu, on perd parfois un peu de sa vraie nature.

- Tu n’as rien compris, pas vrai ? C’est dommage Sébastian que tu ramènes cela uniquement à ta nature et au contexte qui se répète inlassablement entre nos deux races. Tu mets en avant ta position, mais tu oublies la mienne la dedans. Je connais des Asariens que je peux considérer comme des amis. Je ne te pense pas sanguinaire ou mauvais.

Je remontai la fermeture- éclaire de mon blouson et je mis mon bonnet sur ma tête. Je ne devais pas oublier que dehors, c’était encore l’hiver et que la nuit, les températures étaient fraiches même sous les dômes de la cité.

- On se reverra très certainement dans les bidonvilles ou bien au dispensaire. J’ai toujours le chic de me blesser et toi d’être là pour me soigner.

Je me dirigeai vers la sortie. J’allais devoir me faire très discrète et regagner l’extérieur rapidement. Mais avant de disparaitre pour rejoindre les souterrains, je me retournai une dernière fois vers lui.

- On a tous notre passé et nos expériences. Ce sont ces expériences qui nous forgent et nous marquent. Tu vis dans un monde où tout est facile pour toi. Je vis dans un monde où tout n’est que danger. Ce ne sont pas des idées ou des convictions. Ce n’est ni la peur ou la crainte. C’est la réalité.  Que nous reste-t-il dans tout ceci ? La confiance. Merci pour ce petit échauffement et peut-être à bientôt.