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 Il faut toujours se méfier de l'homme tranquille...

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MessageSujet: Il faut toujours se méfier de l'homme tranquille...   Il faut toujours se méfier de l'homme tranquille... EmptyMar 15 Oct - 20:43

Il faut toujours se méfier de l'homme tranquille... Aaron_11

"Il faut toujours se méfier de l'homme tranquille." Non, cette maxime n'était pas tiré d'un grand classique philosophique ou d'un discours célèbre. Aaron l'avait entendue dans un vieux divertissement mettant en scène des hommes à cheval et portant des chapeaux à large bord. Les archives de Leroy le classaient au rayon "western". Le petit garçon facétieux qui sommeillait dans l'âme du jeune chercheur avait beaucoup aimé ce "film" où le justicier n'est pas celui qui porte l'insigne mais celui qui a la conviction que le plus démuni doit aussi être entendu. Et puis il y avait ces bêtes étranges avec de longs membres et des poils longs fixés sur la tête et aux fesses. Les mémos du petit Aaron les avaient qualifiés d'equus caballus. Il trouvait l'animal imposant et beau mais peu pratique. Ce qui expliquait sans doute qu'il n'ait pas été reproduit en synthèse. Trop archaïque de se déplacer sur son dos alors qu'on disposait de voitures à gravitation magnétique qui glissaient sur les flux comme un surfeur jadis sur la vague.

Enfin, pour l'heure, l'homme n'était pas tranquille du tout mais c'était plutôt lui qui se méfiait. Un cheval au petit trot aurait largement dépassé le vieux camion poussif qui leur servait de véhicule. Cet engin fonctionnait encore avec un moteur à énergie solaire et semblait avoir des ratées tous les cinq tours de roue. Bon sang ! On allait bientôt y arriver à ce relais ? Cela faisait six heures qu'ils avaient quitté la protection du Q.G. et le temps qu'ils mènent à bien leur mission, ils auraient tout juste le temps de regagner le Phénix avant le lever du soleil. En zone montagneuse la lumière tapait particulièrement dur et il n'avait pas spécialement envie de finir en barbecue. Les autres membres de l'expédition, tous humains, ne risquaient pas grand chose à part des coups de soleil, car les journées étaient chaudes. Le soleil était peu clément passées les vapeurs matinales qui s'élevaient du sol en volutes blanchâtres, rappelant que les nuits restaient fraîches en dehors de la protection de l'enceinte de verre, même si la Pluie de Feu avait singulièrement accéléré le réchauffement climatique.

Aaron avait récupéré des données enregistrées il y avait plus de cent ans par des récepteurs très archaïques qu'il avait trouvé à la vieille base militaire. Le gouvernement Asarien donnait ses propres nouvelles de "l'extérieur" et ne cessait de rappeler qu'il était urgent de ne pas tenter de s'éloigner du nid protecteur que constituait Asaria. A les en croire, tout n'était que désolation dans l'hémisphère nord, et l'enfer s'était refermé sur les malheureux Asariens qui avaient trop tardé et avaient été ensuite trop atteints pour entreprendre la grande transhumance. On brossait le tableau d'êtres difformes et brûlés, souffrant le martyre, avant de rendre leur dernier soupir. On parlait de terre stérile devenue inculte par le feu et les radiations. On mentionnait également que tous esclaves ayant péri là-bas, les Asariens qui auraient l'étrange idée d'y tenter un retour se trouveraient dans une grande "solitude" et bien démunis de main d'oeuvre pour les servir. Toujours ce cynisme cruel des Longue-Vies.

Aaron, lui, se demandait si la vie n'avait pas pu survivre autour de l'autre pôle, de la même façon qu'elle avait perdurée ici, sur la terre d'accueil d'Asaria. Après tout, si le froid avait étrangement amorti l'effet des radiations et le souffle thermique au Sud, il n'était pas impossible qu'il ait fait de même au Nord. Tout dépendait en fait des lieux d'impact des nombreuses bombes thermonucléaires. Et ces informations, si elles avaient été collectées et conservées, ne pouvaient être détenues que par le gouvernement qui les cacherait ou en dévoilerait uniquement les parties qui lui étaient favorables. Ce qui était plus que troublant, c'était ces échanges enregistrés entre la base de l'US Navy et les responsables de la force de coalition américaine au sujet d'expériences de survie en milieu hostile et de mesures de radiations en milieu naturel sub arctique mentionnaient qu'apparemment, à l'époque où la base américaine était active, les coalitions de l'Est se livraient aux mêmes expérience en Sibérie. Les deux blocs politiques les plus puissantes avaient entamé des expériences sur la survie en cas de conflit majeur. Rétrospectivement cela avait de quoi donner des frissons dans le dos et Aaron s'était demandé si les scientifiques de l'époque avaient pu imaginer à quel point leurs hypothèses pourraient se révéler fondées. Assurément non. L'Homme joue à se faire peur en agitant des spectres sous son propre nez, mais arrive toujours à se convaincre que les monstres n'existent pas vraiment. Quoi qu'il en soit ces échanges enregistrés et datant de quelques années avant la Pluie de Feu devaient être portés à la connaissance du public car même s'ils démontraient tristement que les politiques et militaires de l'époque n'ignoraient pas les risques du terrible équilibre de la mort qui était engagé, ils ouvraient aussi une perspective d'espoir concernant ceux qui étaient restés au nord. Peut-être qu'Asaria n'était pas le seul petit îlot de vie au milieu d'un océan de désolation. Le peuple avait besoin de croire que sa liberté pouvait avoir d'autres frontières que les Dômes et même si les espoirs étaient déçus, même si les expéditions ne trouvaient que mort et cendres en recherchant la vie, au moins, ils auraient essayé, et peut-être ce but réunirait-il tous les exilés et leur ferait oublier la haine qui les dressait les uns contre les autres, durant quelques temps... Peut-être... Parfois Aaron se surprenait à en rêver et dans la minute suivante, il pestait contre sa naïveté qui revenait souvent en vagues aigües.

La séquence était courte mais suffisante et sa qualité défiait aisément toute expertise qui voudrait la faire passer pour un médiocre trucage. Pour une fois, ce n'était pas un rapport scientifique couvert de formules hermétiques et de courbes, de combinaisons protéiniques, qu'il avait apporté au Q.G. des Pacifistes mais une copie de cet enregistrement qui redonnerait peut-être une lueur d'espoir. Des êtres vivants humanoïdes, Asariens ou pas, auraient peut-être pu trouver asile au nord sur des terres ayant une climatologie originelle similaire à celle qui servait de berceau à Asaria. Les lieux d'implantation de ces expériences anciennes semblaient être les lieux à explorer en priorité. C'était quelque chose que les Pacificateurs se devaient de faire connaître au public.Même si la majorité des Longues-Vies n'avait aucune raison de vouloir quitter le confort des cloches de verre, certains rares courageux se poseraient les bonnes questions et les humains sauraient qu'un avenir plus libre les attendait peut-être sur des terres lointaines, avenir incertain mais libre...

L'opération de diffusion sauvage sur un émetteur gouvernemental était trop tentante. Il ne s'était même pas posé la question et s'était porté volontaire immédiatement pour être du commando. Il était en vacances forcées après qu'un malheureux incendie ait ravagé le système électronique de fermeture des sas de décontamination de son labo. L'enquête peinait encore à établir quelle défaillance technique avait pu provoquer de tels dommages. Aaron s'était offert les vacances qu'on ne lui offrirait jamais. Depuis une semaine il crapahutait hors du Dôme, bivouaquant à la belle étoile et s'abritant dans les grottes qui parsemaient la barrière montagneuse, du levé du jour à la tombée de la nuit. Il se mettait en chemin sitôt les derniers rayons du soleil disparus. C'était l'un de ses plus vifs regrets : ne pouvoir contempler un lever de soleil. Comme cela devait être magnifique dans la barrière montagneuse. Il en avait un sorte d'avant goût en assistant à son déclin derrière les montagnes dont les crêtes poudroyaient alors dans un camaïeu d'ocres et d'orangers. Il s'était promis d'assister à l'un d'eux un jour, en se couvrant. Ce jour-là, il le savait, il ne le partagerait qu'avec un être exceptionnel. Il avait fait ainsi des relevés topographiques du versant nord de la barrière du sud. Derrière, personne ne savait ce qu'il y avait. Il fallait plusieurs semaines pour franchir les sommets. Il se sentait plus vivant que jamais au milieu des ces étendues désertiques qui avaient été glaciales, il le savait. Sa barbe avait poussée et il avait plus du baroudeur que du rat de laboratoire. Il en profiterait toute fois pour récolter un peu de ce lichen étrange qui poussait au pied du relais. La grande tourelle bétonnée et hérissée de fil de fer barbelés triples étoiles apparut bientôt à l'horizon. Son canon à ondes longues portées orientable était tourné vers Asaria. Il savait qu'aucune information de l'extérieur n'arrivait dans ce récepteur émetteur. Le gouvernement fabriquait ses propres images, ses propres infos, les envoyait ici puis les renvoyait sur tous les relais de la cité pour donner l'illusion qu'Asaria était empathique des terribles réalités du monde. Ils allaient court-circuiter l'émission et la remplacer par leur propre programme.

La silhouette du pylône grossissait à vue d'oeil alors que le camion soulevait une poussière fine sur la piste cahoteuse défoncée par les crues de printemps. Le camion de devant qui ne valait guère mieux transportait un petit groupe d'hommes chargé de la protection de la mission. Si un pacificateur n'attaquait jamais, il devait se défendre. Aaron, accoudé à la portière, se demandait bien pourquoi ce fichu camion ralentissait soudain puis s'arrêtait.

- Y a quelque chose qui cloche ... Passe la marche arrière et fonce, Doug ! Fais ce que je te dis, bord...

Il n'eut pas le temps de se poser trop la question. Le juron se perdit dans le bruit assourdissant de l'explosion et ils virent l'arrière du camion qui les précédait se soulever et partir en miettes, soufflé par un brasier infernal. L'essieu passa en sifflant par dessus leur cabine et vint s'écraser sur la bâche de leur remorque tandis que Doug faisait fumer les pneus.

- Ces enfoirés nous allument au lance-rocket ! gueula Aaron pour masquer son impuissance.

- Sans déc ? Moi j'aurai plutôt dit que c'était une bombe thermique à guidage infrarouge. Je vois personne et ils doivent nous tirer de la montagne.

Aaron hocha la tête négativement.

- Ils auraient pas sorti le grand jeu juste pour nos beaux yeux! C'est pas la milice gouvernementale, c'est les Rebelles.

Doug fit un demi-tour volte face qui arracha des bruits de protestation inquiétants au bas de caisse rouillé du mastodonte.

- Chais, pas mec ! Mais j'vais pas attendre qu'ils arrivent pour leur demander. Appelle la base.

Aaron se baissa pour tirer la radio à ondes courtes qui était planquée sous le siège. Une antiquité qui fonctionnait de manière un peu mystérieuse pour les jeunes pacifistes mais que le généticien avait eu tout le loisir d'étudier les samedis soirs où il préférait s'isoler dans l'atelier de la maison familiale plutôt que de sortir encore. Il y avait certains week end comme ça, depuis qu'il avait intégré les rangs des Pacifistes, où même de la part de Jessica qui le fascinait, les propos anthropophobes l'excédaient . Comment pouvait-on avoir un physique à faire bander un mort et avoir tant de froideur dans le regard, sucer comme une déesse - du moins le supposait-il, n'ayant jamais eu la chance d'expérimenter, à la mine réjouie des mâles qu'il voyait sortir du bureau de la patronne du Light of Diamond lorsqu'il lui arrivait de s'y rendre - mais avoir une bouche d'où sortaient des propos si haineux .

Il actionna le commutateur de la radio en se relevant mais lorsqu'il jeta un oeil dans le rétroviseur, son geste se figea.

- Doug !!! Arrête ce camion! Ou fais demi-tour ! On a deux gars en vie qui nous font des signes.

Doug jeta un oeil nerveux au rétro latéral.

- Aaron, si on y retourne on crève tous ... Tu le sais aussi bien que moi. Ils nous tireront comme à la parade.

Aaron avait reposé la radio et réfléchissait, les yeux exorbités, fixant le petit miroir dans lequel deux des leurs faisaient des signes désespérés les invitant à revenir. Pourquoi ne tentaient-ils pas de courir vers le camion ? De les rejoindre ?

- Putain de sa mère la salope !Hurla Aaron. C'était pas un lance rocket ! C'est des mines. Ils ont sauté sur une mine. Arrête le camion, je vais les chercher. Arrête! J'te dis ! Si ça se trouve il y en a aussi plus loin. On a le cul bordé d'nouilles de pas avoir sauté aussi !

Cette fois-ci, Doug freina net et le considéra ahuri.

-Hé ben mon gars, t'as élargi ton vocabulaire! Mais tu devrais aviser la base. Si tu mets en péril la mission pour sauver deux gars, tu vas te faire allumer !

Aaron se passa le bras sur le front pour essuyer la sueur avant de répondre en sautant du camion, un étrange sourire sur les lèvres:

- Eh bien soit ! qu'elle m'allume, j'attends qu'ça !

- P'tit con ! J'l'appelle! Répondit laconiquement Doug avant de se pencher pour empoigner la radio.

Sur le côté de la piste, la grande silhouette d'Aaron avançait lentement, un pas après l'autre, se penchant parfois pour balayer délicatement la poussière du bout des doigts. Il avait attaché ses cheveux avec l'élastique qu'il portait toujours au poignet et les yeux rivés sur le sol, méthodiquement, il mémorisait l'un après l'autre les emplacements où il posait ses pieds.


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